L'histoire du Bouddhisme japonais
Les bosatsu sont les bodhisattvas vus précédemment. Ils sont illuminés, mais reportent leur passage au nirvana dans le but d'aider tous les êtres vivants à atteindre l'illumination. Ils constituent la pierre angulaire du bouddhisme Mahayana. Leur apparence est habituellement plus chargée que celle des précédents, mais ils sont aussi dans une position digne, assise ou debout.
On compte dans leurs rangs :
Kannon, dieu ou déesse de la miséricorde, qui vient en huit versions (au moins), en trente-trois incarnations officielles (sanjusanshin) et qui gravite autour d'Amida Nyorai. Elle a parfois onze têtes (Juichimen Kannon), parfois mille bras (Senju Kannon) - en fait les statues en ont habituellement seulement 42 - et parfois elle a une tête de cheval dans sa coiffure et porte alors le nom de Bato Kannon. Elle est parmis les divinités les plus populaires aujourd'hui au Japon. En Chine c'est Quan Yin et en Inde Avalokitesvara. À l'époque où le christianisme était banni au Japon, elle représentait pour les chrétiens japonais la Vierge Marie, sous le nom Maria Kannon. Elle a vingt-huit aides, les nijuhachibu shu, dont la liste varie. Tarani Bosatsu (Tara au Tibet) est parfois une de deux aides de Kannon, parfois sa forme féminine, parfois encore une de ses incarnations, voir son épouse.
Seishi, aussi lié à Amida Bouddha, est le Bosatsu de la force, celle de celui qui a atteint la sagesse et la compassion. Ses mains sont souvent jointes en prière ou tiennent un lotus.
Jizo est un dieu populaire. Il est lié aux Enfers, à la protection des enfants, des femmes enceintes, des pompiers, des voyageurs et des pélerins. On trouve sur les routes et dans les cimetières des statues le représentant, souvent affublées d'un bonnet et d'une bavette rouges. Quand des jouets sont là, ils sont envoyés dans l'au-delà à un enfant mort. Il est représenté comme un pélerin, le crâne chauve et portant un long bâton d'où pendent six anneaux dans sa main droite. Il tient aussi souvent un joyau dans l'autre. Lui aussi a plusieurs titres, qui diffèrent en fonction de ce qu'il protège, Mizuko Jizo pour les enfants mort-nés, Anzan Jizo pour les femmes enceintes, Hitaki Jizo ou Kuro Jizo pour les pompiers, Migawari Jizo qui se substitue à ceux qui souffrent et même un Shogun Jizo protecteur des champs de bataille et portant une armure. En Inde c'est Ksitigarbha et en Chine Ti Ts'ang Wang ou Di-zang.
Miroku, aussi appelé Jishi Bosatsu, est le bouddha de l'avenir, mais en attendant il oeuvre en tant que bosatsu.
Kokuzo est le dieu de la mémoire et de la sagesse, et est le protecteur des artisans. Habituellement il tient dans une main le joyaux qui accorde les souhaits, parfois placé au bout d'une tige de lotus. L'autre main peut tenir une épée (symbole de la sagesse) ou toucher le sol si elle est vide.
Monju est le bosatsu de la sagesse, de l'intelligence et de la beauté. Il chevauche habituellement un shishi, un chien-lion mythique chinois. Il peut tenir un lotus, une épée, un sutra, et souvent les deux derniers, un dans chaque main. Avec Fugen, qui suit, il est l'aide de Shaka Nyorai, le bouddha historique.
Fugen, que l'on représente souvent assis sur un éléphant, souvent blanc et à six défenses, comme celui dont rêva la mère du Bouddha, est le protecteur de la pratique bouddhiste et de ceux qui l'enseignent.
Kongo Shu, qui personnifit l'énergie et la puissance du Bouddha, a deux formes, l'une terrible où vêtu d'une peau de tigre et entouré de flammes il brandit la vajra (symbole de la foudre) et est affilié au soleil, et l'autre paisible où il est bleu et tient un lotus où repose la vajra et est alors affilié à la lune. Il serait affilié au dieu hindou Indra et au demi-dieu grec Héraklès, et les Nio sont ses manifestations.
Gakko et Nikko, comme on l'a vu, sont les aides de Yakushi Nyorai, mais aussi parfois de Kannon. Le premier est le dieu de la lune et le second, son frère, celui du soleil.
Yaku-O et Yaku-Jo, encore deux frères, cette fois rattachés à Amida Bouddha, sont les rois de la médecine et sont pour cela assimilés à Yakushi Nyorai. On les représente habituellement tenant une branche de saule.
Les huit premiers de la liste seraient les huit grands bosatsu. Kannon, Monju et Kongo Shu sont considérés comme les trois protecteurs du Bouddha, représentant respectivement sa miséricorde, sa sagesse et sa force.
À gauche, Senju Kannon.
À droite, Bato Kannon.
Notez le mudra à droite et en bas, qui est celui de l'adoration.
À gauche Juichimen Kannon.
À droite, son confrère Seishi Bosatsu.
Ces images viennent du site du temple Saimyouji, qui en a plusieurs autres.
À gauche cette statue géante à Ofuna représente Hakue Kannon (à la robe blanche).
À droite, Jizo Bosatsu. Notez le bâton de pélerin avec les anneaux et le crâne chauve.
À gauche, Monju Bosatsu, qui chevauche un shishi.
À droite, son confrère Fugen chevauchant un éléphant.
Ces images, peintes par Itô Jakuchû, viennent du site du temple Shôkokuji.
Il éxiste une déesse shinto appelée Koyasu qui protège les mères et les enfants. Dans le syncrétisme religieux japonais, elle est identifiée à des divinités protectrices bouddhistes, comme Koyasu Jizo, Koyasu Kishibojin (que nous verrons plus loin) et Koyasu Kannon, ayant tous un rôle comparable. Kannon et Jizo, qui n'en sont pas à une appellation près, dans ce rôle portent aussi les noms de Juntei Kannon, Jibo Kannon et Kosodate Jizo.
Incidemment Jizo et Kannon ont changé de sexe entre l'Inde et la Chine, le premier étant féminin et la seconde masculine dans leur pays d'origine.
Les myo-o, c'est-à-dire les "rois de luminescente sagesse", sont dans la secte Shingon notamment, des dieux hindous s'étant convertis au bouddhisme et qui sont devenus les protecteurs des deux précédents groupes, essentiellement de Dainichi Nyorai. Ils ont une allure guerrière et terrible que dans le christianisme ont prêterait aux démons, mais le bouddhisme voit cela comme une force qui s'exerce contre celles du mal. Les Daigo Myo-o, les "cinq grands rois", qui sont les principaux, sont :
Fudo Myo-o qui est le plus connu et que l'on qualifie d'inamovible. Il garde le centre et est représenté assis, parfois debout, tenant une épée et une corde, un croc pointant vers le bas et un autre vers le haut, et entouré de flammes. Il a huit assistants, les hachidai doji, les deux principaux, qui forment avec lui une triade, étant Kongara Doji (placé à gauche il personnifie l'obéissance) et Seitaka Doji (à droite, personnifiant l'action). Les autres portent les noms de Anokudatsu Doji, Shitoku Doji, Ukubaga Doji, Shojobiku Doji, Eko Doji et Eki Doji. Il est à noter que Monju Bosatsu hérite occasionellement de cette suite.
Gozanze a trois têtes et huit bras. Il tient une flèche et garde l'est.
Gundari est gardien du sud. Il a aussi trois têtes et huit bras et des serpents entourent souvent ses chevilles et son cou.
Daitoku a six têtes, six jambes et six bras tenant diverses armes. Il chevauche une vache blanche (symbole d'illumination) et protège aussi Amida Bouddha dans son Paradis occidental.
Kongo-Yasha, qui a parfois trois têtes et six bras, et parfois une tête et seulement quatre bras, est le gardien du nord.
Mais il y en a trois autres d'une certaine importance :
Aizen, dieu de l'amour et roi de la passion sexuelle, converti les passions terrestes en éveil spirituel. Il a trois têtes, trois yeux (sur chaque tête) et six bras qui tiennent des armes, souvent un arc et une flèche. Il porte aussi souvent une couronne où on peut voir un shishi et son corps est rouge, symbolisant son pouvoir de purifier les désirs sexuels.
Kujaku, qui est représenté assis sur un paon, protège des poisons et des calamités. Il a une tête et quatre bras.
Bato Myo-o a six yeux et huit bras. Il a la réputation de pouvoir tout manger et si on fait appel à lui dans le malheur, il le mangera... peut-être...
À gauche, Fudo Myo-o.
À droite, son confrère Aizen Myo-o.
On peut noter que dans la secte Shingon, les treize bouddhas (jusan butsu), qui sont souvent représentés sur les mandalas, sont Shaka Nyorai, Monju Bosatsu, Fugen Bosatsu, Jizo Bosatsu, Miroku Bosatsu, Yakushi Nyorai, Kannon Bosatsu, Seishi Bosatsu, Amida Nyorai, Ashuku Nyorai, Dainichi Nyorai, Kokuzo Bosatsu et Fudo Myo-o. Mais Bishamonten et Benten, que nous verrons plus loin, et Kobo Daishi, le fondateur de la secte, ont aussi leur importance.
Et c'est là que ça se complique, non pas qu'avant c'était simple, mais ici on contemple des sommets dans le détail et la contradiction.
Les tenbu, les "êtres célestes", sont au sens strict des dévas, c'est-à-dire des dieux hindous, qui convertis au bouddhisme en sont devenus, comme les myo-o, les défenseurs. Ils ont aussi généralement une allure martiale et menaçante, mais destinée aux ennemis du bouddhisme, comme l'ignorance et la méchanceté.
Les principaux sont :
Bishamonten, aussi connu sous le nom Bonten, qui est le dieu des guerriers et nul autre que le dieu hindou Brahma.
Kichijoten ou Kisshoten, Laksmi, l'épouse de Vishnou dans l'hindouisme, est l'épouse ou la soeur de Bishamonten dans le bouddhisme, et la déesse de la chance et de la beauté.
Benzaiten ou Benten est la patronne des arts et de la musique. Elle est souvent représentée jouant du biwa (luth japonais), parfois nue. Son culte est lié à celui du serpent, ou du dragon. Elle a seize enfants, souvent ce sont des filles, qui sont peut-être en fait des incarnations. En Inde c'est Sarasvati.
Daikokuten est le dieu de la fortune et patron des fermiers, la richesse au Japon se calculant traditionellement en riz.
De gauche à droite : Bishamonten, Kichijoten et Benzaiten
Il y a aussi des associations de dévas. Par exemples les Shitenno, gardiens des quatre directions, sont Jikokuten (Dhrtarasta, à l'est), Komokuten (Virupaksa, à l'ouest), Zochoten (Virudhaka, au sud) et Tamonten (Vaisravana, au nord). Mais ils sont en fait cinq, étant dirigés par Taishakuten, le dieu Indra, qui règne sur le centre. Le parallèle avec les myo-o est frappant.
Ils sont souvent représentés marchant sur des démons, les tentoki, d'ailleurs pas très costauds, un peu comme si vous marchiez sur un enfant de trois ans. Ceux-ci sont du coup sauvés et portent désormais des lanternes pour illuminer la route devant Shaka Nyorai, rôle qu'ils partagent avec les ryutoki.
Les Shitenno
Les Juniten, gardiens de toutes les directions, sont Bonten (Brahman qui garde les cieux), Taishakuten (Indra qui garde l'est), Tamonten (Vaisravana au nord), Katen (Agri au sud-est), Enmaten (Yama au sud), Rasetsuten (Rakasasa au sud-ouest), Suiten (Varuna qui garde l'ouest), Futen (Vayu au nord-ouest), Ishanaten (Isana au nord-est), Jiten (Prthivi gardien de la terre), Nitten (Surya ou Aditya, gardien du soleil) et Gatten (Candra gardien de la lune). Le parallèle entre les deux derniers et les bosatsu Nikko et Gakko est aussi évident. Notons que Taishakuten n'est plus au centre mais à l'est, Et puis ailleurs, Bonten (Bishamonten) et Tamonten sont parfois la même personne...
Enfin les Nio, les deux gardiens que l'on voit parfois à l'entrée des temples sont Agyo et Ungyo, ou Shukongoshin et Kongorikishi, et sont reliés au bouddhisme tantrique. Un de leurs noms vient de A et UM, le A et le Z de l'écriture japonaise, une sorte d'alpha et d'oméga qui symbolise leur capacité de protéger le temple contre tout. Comparé aux Juniten, c'est une économie de moyen fort louable. Le premier, qui a la bouche ouverte, représente la force active, l'autre représente la force passive et a la bouche fermée. Les deux sont une manifestation de Kongo Shu bosatsu.
À gauche Agyo. Notez la bouche ouverte.
À droite Ungyo, qui a la bouche fermée.
Mais le terme tenbu semble s'appliquer aussi à tous les êtres intelligents non-humains et non-illuminés de l'univers. Dans ce sens, il y a huit races impliquées.
Les dévas, appelés ten (ciel) ou tenbu, que l'on a vu plus haut.
Les ryuu (dragons), qui sont les nagas indiens.
Les yasha, divinitées guerrières, guardiennes de la nature.
Les kendatsuba, dieux de la musique, de la médecine et protecteurs des enfants.
Les ashura, dans l'hindouisme ils sont une sorte de démons ennemis des dévas, mais dans le bouddhisme on les représente avec trois têtes et six bras, et ils sont commandés par Taishakuten, qui serait en Inde un ennemi héréditaire...
Les karura, humanoïdes à tête d'oiseaux, ennemis des ryuu.
Les kinnara qui sont des musiciens célestes.
Les magoraka qui sont des musiciens à corps de serpent.
Les yasha sont au nombre de douze (Kubira, Basara ou Bajira, Mekira, Anchira, Anira, Sanchira, Indara, Haira, Makora, Shindara ou Kimnara, Shotora et Bikara), ce sont les douze généraux, les Juni Shinsho ou Taisho, au service de Yakushi Nyorai et chacun est rattaché à un des douze animaux du zodiaque chinois. Dans le même ordre: rat, boeuf, tigre, lapin, dragon, serpent, cheval, mouton, singe, coq, chien et sanglier. Ils sont aussi assimilés à une couleur et une arme.
Puis Mark Schumacher, dans son Buddhist Corner, auquel cette page doit beaucoup, mentionne un autre groupe de divinités protectrices couvrant les huit directions et rattachées aux animaux du zodiaque, mais cette fois il est constitué de nyorai et de bosatsu :
Amida Nyorai (N-O, sanglier et chien),
Fudo Myo (ouest, le coq),
Dainichi Nyorai (S-O, singe et mouton),
Seishi Bosatsu (sud et cheval),
Fugen Bosatsu (S-E, serpent et dragon),
Monju Bosatsu (est, le lapin),
Kokuzo Bosatsu (N-E, boeuf et tigre)
et Senju Kannon (nord et rat).
Il y a huit directions, mais douze animaux... Et puis pourquoi Amida - le gardien du paradis occidental - n'est pas à l'ouest reste un mystère pour moi.
Il y a aussi les shichifukujin, les sept dieux de la chance : Ebisu originaire du Japon, Daikokuten, Benzaiten et Bishamonten, que l'on a vu plus haut et qui viennent de l'Inde, Hotei, Fukurokuju et Jurojin qui sont chinois. Toute la petite troupe se balade habituellement sur un bateau.
Ebisu est un dieu de la prospérité et est représenté avec un rouget, symbole de bonheur.
Daikokuten, autre dieu de la prospérité qui est parfois considéré comme le père d'Ebisu, porte un maillet et un sac, et marche sur des balles de riz.
Bishamonten est en armure et porte souvent une lance et une petite pagode, symbole du bouddhisme.
Benzaiten est la déesse de la littérature, des arts et sciences, du bonheur, de la prospérité, de la vertu et de la longévité... et comme vu plus haut, elle a un biwa.
Fukurokuju est une divinité du bonheur, de la prospérité, de la longevité et de la sagesse. Il a le crâne très haut et chauve, ainsi qu'une longue barbe blanche, symbole de son grand âge et de sa sagesse. Il porte parfois un bâton et un parchemin contenant la sagesse du monde.
Jurojin est aussi un dieu du bonheur, de la prospérité et de la longévité. Il a une longue barbe blanche et porte un bonnet d'érudit. Il est parfois accompagné d'un cerf. Il porte lui-aussi un bâton et un parchemin, mais le sien contient le secret de la longévité.
Hotei est encore un dieu de la prospérité et du bonheur. Ce serait en fait un prêtre zen chinois du nom de Pu-tai. Il a une grosse bedaine et rit tout le temps. Il porte un sac contenant des richesses.
De gauche à droite: Jurojin, Fukurokuju, Hotei, Benzaiten, Bishamonten, Ebisu et Daikokuten
Il existe une version "noire" de Daikokuten. D'ailleurs le mot koku, dans son nom, signifit justement cette couleur. Elle est beaucoup plus inquiétante que la représentation bonhomme habituelle, et est sans doute beaucoup plus près de ses origines agraires, les dieux de l'agriculture étant généralement liés aux Enfers.
Parlant de ceux-ci, il y a les juges des Enfers, les Ju-o ou Dix Rois. Ils sont parmis les protecteurs de la foi bouddhiste. La personne décédée passe successivement devant Shinko-o, Shoko-o, Sotai-o (prononciation Soté), Gokan-o, Enma Daio (Yama en sanskrit), Henjo-o, Taizan-o (encore une fois Tézan), Byodo-o, Toshi-o (prononciation Toshé) et Godo-tenrin-o. Enma-o, qui est le principal juge, d'où sont titre de Daio (Grand Roi), donne le verdict. Il est souvent représenté assis entre Taizan-o et Godo Tenrin-o.
Enma-o et ses aides, du temple Hoshaku-ji.
En avant, celui qui lit et annonce le jugement est Shimyo; celui qui écrit Shiroku.
Aussi liée aux Enfers, Datsue-ba, aussi appelée Sanzu-no-baba ou Shozuka no Baba, est une vieille femme, ou un démon ayant cette apparence, qui est assise près de la rivière Sanzu, que doivent traverser les défunts. Elle retire les vêtements de ceux ayant été reconnus méchants et qui doivent traverser à la nage.
Jizo, qui comme on l'a vu est aussi une divinité infernale, guide les bons sur un pont enjambant la rivière. Malheureusement, les enfants morts-nés, avortés ou morts en bas âge sont trop petits pour traverser la rivière. Ils empilent des cailloux sur la berge pour attirer l'attention et la compassion du Bouddha, mais des démons, qui seraient peut-être aux ordres de Datsue-ba, détruisent leur travail et les terrorisent. Pour les protéger, Jizo les cache dans ses manches.
Ça ne me semble pas être le comble de l'efficacité. Il y a un pont! Il peut les porter dans ses manches... Mais l'idée est que ces enfants, qui seraient purs dans le christianisme, sont dans le bouddhisme responsables de la douleur de leurs parents, y compris les avortés. Pourquoi deux standards basés sur la taille, les adultes pouvant traverser et les bébés devant rester là? Pourquoi, alors que les criminels les plus endurcis peuvent éventuellement quitter les Enfers, ces enfants sont laissés dans un cul de sac réincarnatoire ? Je pense que cette histoire, qui ne me semble pas très cohérente avec le reste de la philosophie bouddhiste, doit être basée sur des croyances populaires.
Enfin il y a Karitemo, aussi appelée Kishibojin. C'est un ancien démon femelle qui donnait des enfants en pâture aux siens. Convertie au bouddhisme, elle est devenue protectrice des enfants et de la famille. Elle a dix filles, les Rasetsu ou Jurasetsu-nyo, devenues comme elle protectrices du bouddhisme.
Quel est le statut de ces dieux, d'Ebisu et de ses trois copains chinois? Je ne sais pas, mais Enma-o est assimilable à Enmaten, un des Juniten vus plus haut et Karitemo est souvent assimilée à Kannon, qui dans cette fusion hérite d'un lourd passé, comme si Mère Thérésa avait été un tueur en série dans sa jeunesse...
Et tout ce petit monde est susceptible d'avoir sa statue quelque part dans le temple que l'on visite.
Puis dans un coin du temple, habituellement à l'arrière de part ou d'autre de l'autel principal, on voit parfois des statues d'êtres humains, habituellement des prêtres. Ils sont assis dans la même position que le Bouddha, mais on les reconnait au plus grand réalisme qu'ils dégagent.
On représentera aussi les arhat ou rakan, les disciples du Bouddha qui sont parfois au nombre de quatre, souvent au nombre de seize, mais ils sont souvent peints. Il y a une notable exception: les gohyaku rakan, les cinq cent disciples du Bouddha, qui sont sculptés. Ils ont chacun une expression différente. On dit qu'il est possible d'en trouver un qui ressemble à chaque personne qu'on connait.
Il y a également un groupe de dix disciples de Shaka Nyorai, le Bouddha historique, qui sont Daikasho (Mahakasyapa en Sanskrit), Anaritsu (Aniruddha), Furuna (Purna), Kasen'nen (Katyayana), Ubari (Upali), Ragora (Rahula), Sharihotsu (Sariputra), Mokukenren (Mhamaudgalyayana), Ananda (Ananda), Shubodai (Subhuti), et qui répendront l'enseignement du Bouddha à sa mort. Pourquoi parfois quatre, parfois dix, seize ou même cinq cent? Je ne sais pas.
Et puis Daruma, le moine indien fondateur du bouddhisme zen en Chine est aussi parfois représenté.
Ce qu'il faut comprendre c'est que seuls les nyorai et les bosatsu étant illuminés, les autres races, y compris les myo-o et les tenbu, qui sont finalement des dieux, sont toujours soumises au samsara, à la réincarnation.
Exactement il y a six niveaux d'existence soumis au samsara, appelés rokudo, et donc six catégories d'êtres:
Les dévas.
Les humains.
Les asura.
Les animaux.
Les fantômes affamés dans le Preta.
Les damnés dans les Enfers.
Les trois premiers niveaux étant les niveaux supérieurs et les trois derniers, les niveaux inférieurs. Et oui, les asura, qui sont pourtant des êtres célestes et des demi-dieux, sont sous les humains, à cause de leur nature passionnée et colérique. Quand aux ryuu, aux yasha et aux autres tenbu précédemment vus, je n'ai aucune idée à quel niveau ils se trouvent. Et je suppose que les myo-o sont au même niveau que les dévas.
On a vu plus haut que les défunts passent devant des juges infernaux. Après leur jugement, ils se réincarnent sur l'un des six niveaux, qui sont tous, pas seulement l'Enfer, des endroits où on regrette ses erreurs.
Jizo est souvent représenté en un groupe de six (roku jizo). Ceci illustre sa capacité de protéger les gens dans tous les niveaux d'existence où son intervention est nécessaire. Les noms des six incarnations sont, des Enfers aux dévas, Enmei, Hoshu, Hoin, Hosho, Jichi, et Kengoi (ou Nikko). Et dans la tradition ésotérique, Kannon a aussi six versions: Sho Kannon s'occupe des Enfers, Senju Kannon des fantômes affamés, Bato Kannon est assimilée aux animaux, Juichimen Kannon est la protectrice des ashura, Juntei Kannon (Shingon) ou Fukukenjaku Kannon (Tendai) s'occupe des humains et Nyoirin Kannon, avec ses six bras, protège les ten. Vous l'aurez deviné, c'est roku kannon.
Au dessus du rokudo, il y a les "quatre mondes nobles" desquels est banni la réincarnation. En haut il y a les nyorai (bouddhas), puis viennent les bosatsu (bodhisattvas), puis les engaku (pratyekabuddhas), qui ont atteint l'illumination par eux-même, et enfin les shomon (shravakas), qui ont suivi l'enseignement du Bouddha.
Source de cet article : Site Internet Nihon Wa